Delphine Arène nous raconte

"le souvenir de la maison morte":

" L'été avait rempli le grande Combe de fleurs. Avant d'en cueillir, j'allai heurter la porte de la grange Pernier qui, avant la guerre, s'ouvrait heureuse devant moi, quoiqu'elle n'abritât plus que deux vieux pour m'accueillir, deux très vieux avec une vache, un bout de jardin; un champ d'orge et un peu d'herbe pour la bête. Ils attendaient des nouvelles de leurs enfants partis en ville et ils attendaient aussi, dans la cuisine sombre ou l'auvent faisait régner un éternel crépuscule, la mort qui viendrait bientôt.

Elle est venue, comme une voleuse dirait-on, qui n'a pris dans la maison que ce qui valait la peine: ses deux habitants, et qui a laissé les sabots du vieux devant la porte de l'écurie, le chapelet de la vieille pendue près du fourneau. Elle a laissé les lettres et les cartes des enfants dans le vide-poche donné en prime par l'épicier qui a passé dans son automobile; - et quand je suis sortie de la maison sans vivants, il m'a semblé que les choses allaient agoniser encore, sans une main pieuse pour les recueillir. "